« La France est unique ! » — Qui est Nicholas Burns, le nouvel ambassadeur (nommé) des États-Unis en Chine ?

Nicholas Burns n’est pas un généreux donateur de la campagne Biden (ce qui est souvent le cas pour ces fonctions à pourvoir), ni un vieil ami politicien du président américain. – NB: À ce sujet, rappelons que Rahm Emanuel, l’ex-maire démocrate de Chicago proposé pour le poste d’ambassadeur au Japon, va devoir faire face non pas aux républicains pour sa confirmation à ce poste mais bien aux démocrates qui critiquent très fortement ce choix. – Burns est un diplomate de carrière. Il a servi sous des administrations républicaines (Bush père) puis démocrates (Bill Clinton).

Burns, comme il est d’usage, s’est fait cuisiné par le Foreign Relations Committee du Sénat américain. Quelques phrases dignes d’intérêt sont ressorties de cette audition ce mercredi, sur un éventuel avantage des USA, sur la nouvelle puissance de la Chine mais aussi sur la place de la France dans l’Indo-Pacifique :

« La Chine a un pouvoir énorme mais très peu d’amis. Notre avantage compétitif ce sont nos nombreux alliés. »

Burns n’a pas tort. Si l’on omet l’accrochage avec la France pour établir l’accord AUKUS, Trump a maltraité ses alliés, Biden, lui, a repris de bonnes relations. Trump s’en est pris à Pékin, jusqu’à l’affrontement, pourtant il a oublié le plus important : les alliés sont indispensables. Trump utilisait la pression, sur le dossier Huawei notamment. Cela a fonctionné mais c’était une vision à très court terme.

La Chine, de son côté, semble faire l’unanimité contre elle et jouer uniquement la carte de la coercition économique. L’Australie est un bon exemple. Ses liens économiques avec la Chine sont trois fois plus importants qu’avec les USA et pourtant elle semble désormais avoir clairement choisi le camp américain.

« La Chine n’est pas une puissance olympienne. »


Nicholas Burns l’admet volontiers : « C’est le plus grand challenge géopolitique du 21e siècle ». (On tourne décidément très vite la page du terrorisme islamique.) Mais il se veut également rassurant par rapport à la perspective d’un déclassement de l’actuelle première puissance mondiale : « La Chine proclame que l’Occident est en déclin. Je ne le crois pas. J’ai confiance en notre histoire. »

« La France est unique en Europe »

Emmanuel Macron peut se réjouir : le prochain ambassadeur américain en Chine est tout à fait conscient de la place « unique » de la France en Indo-Pacifique. C’est du moins ce qui ressort de son interrogatoire par les sénateurs du Congrès. En écoutant l’audition de l’honorable Burns, je suis tombé sur un passage digne d’intérêt.

Lors de son face à face avec Mitt Romney, l’ex-candidat républicain à la Maison Blanche qui a affronté Barack Obama en 2012, Nicholas Burns a évoqué l’Europe et notamment la France. Voici ses mots : « Le président Macron a dénoncé les dangers représentés par la Chine dans la région Indo-Pacifique. Et la France est unique parmi les puissances européennes car c’est aussi un pays de l’Indo-Pacifique. »

Le futur probable ambassadeur faisant évidemment référence à La Réunion pour l’océan indien ; à la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Wallis et Futuna dans l’océan pacifique ; aux 1,65 millions d’habitants qui y résident et à la grande zone économique exclusive (ZEE) que lui accordent ces territoires.

Voici l’extrait vidéo (à 4min 10sec)

Sur Taïwan : «  l’ambiguïté stratégique est … la meilleure politique pour dissuader la Chine »

Ted Cruz, le sénateur populiste texan a également tenu à interroger Burns. Une de ses questions portait sur Taïwan. C’est une question légitime : Est-ce que l’ambiguïté stratégique américaine concernant l’île du sud-est asiatique n’est pas interprétée comme une faiblesse par le régime communiste chinois ?

Sans répondre directement à la question (c-à-d sur la perception d’une faiblesse des Américains), pour Burns il faut continuer dans cette direction. On ne sait donc pas si les USA interviendraient en cas de conflit.

Mais est-ce si étonnant au fond ? Si les USA venaient à s’engager, verbalement ou par traité, à défendre Taïwan, ils prendraient aussitôt le risque de provoquer une réaction immédiate de Pékin. Washington serait de même lié par sa promesse alors qu’elle n’a peut-être pas envie d’intervenir en définitive car son but premier est de rester numéro 1, pas de défendre militairement une île qu’elle reconnaît appartenir “à la Chine” (politique de la Chine unique) même si cela ne revient pas pour autant à dire qu’elle reconnaît l’appartenance de Taipeï “à la Chine communiste”.

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